Protection – les maladies
Le maïs est généralement peu atteint par les maladies cryptogamiques. Cet « avantage écologique » s’explique par les origines de la plante et par le fait que le maïs été sélectionné historiquement sans recours à une protection phytosanitaire. On limitera donc les risques d’apparition par de multiples pratiques préventives et en mettant en oeuvre des stratégies calées sur le niveau de risque observé.
Adapter les pratiques pour limiter les maladies
Plusieurs règles doivent être respectées afin de limiter autant que possible les risques de développement des maladies :
- Une veille régulière des parcelles pour repérer les variétés ou les zones à risque,
- La gestion des résidus de récolte pour diminuer le potentiel infectieux ou les possibilités de refuge de vecteurs de maladies comme les insectes foreurs, associé à des dates de récolte suffisamment précoces, un travail du sol adapté au risque (labour) etc.
- Le tri variétal approprié dans les régions concernées le moment venu : recommandation de variétés tolérantes à l’helminthosporiose ou aux fusariums.
En conditions continentales sèches en été et dans les maïs assolés le risque de certaines maladies est atténué. Cependant selon les années et les régions, le maïs peut être concerné localement par des dégâts. Un bon tri variétal et une lutte intégrée efficace permettent de maîtriser l’helminthosporiose et les fusarioses qui représentent les risques les plus élevés. Les maladies du feuillage peuvent entraîner des pertes de rendement importantes quand il s’agit de maladies très nécrosantes, quand elles s’installent tôt et en cas de récolte tardive.
Les maladies les plus fréquentes
Les nécroses racinaires
Dues au développement de plusieurs champignons (Pythiums, Fusariums, Rhizoctone) souvent associés, les nécroses racinaires se signalent au moment de la récolte par des verses localisées importantes. Afin d’en limiter le développement après repérage des zones ou des variétés à risque, il est important de respecter une bonne conduite agronomique : travail du sol et labour en bonnes conditions ainsi qu’une reprise sur sol suffisamment ressuyé.
Au-delà de ces précautions, la lutte en traitement localisé dans la ligne de semis avec l’azoxystrobine par exemple de la famille chimique des strobilurines apporte une bonne solution en particulier contre le rhizoctone
L’helminthosporiose
Il existe plusieurs variantes de l’helminthosporiose de nuisibilité variable. Les attaques interviennent après la floraison et peuvent être foudroyantes et provoquer un effondrement de l’activité photosynthétique du maïs. Dans les situations les plus critiques à développement précoce et rapide, les pertes de rendement peuvent atteindre 20 à 50 % en grain.
La connaissance des situations à risque est un préalable à la mise en œuvre de mesures de prévention adaptées.
Le risque parcellaire est le plus élevé lorsque les conditions suivantes sont réunies :
- zone à développement endémique d’helminthosporiose ou forte attaque constatée l’année précédente,
- utilisation répétée de variétés sensibles, notamment en cas de monoculture,
- travail du sol superficiel (semis direct), absence de broyage des résidus de culture,
- proximité de cribs ou de séchoirs.
La lutte contre l’helminthosporiose passe donc d’abord par des précautions agronomiques simples :
- surveillance des parcelles,
- broyage fin et enfouissement des résidus de maïs,
- choix de variétés peu sensibles.
Les charbons : charbon commun et charbon des inflorescences
Le charbon commun est le plus fréquent. Les spores d’Ustilago maydis sont naturellement très présentes dans l’environnement de la culture et très volatiles. La contamination se fait souvent à partir de portes d’entrée « naturelles » (soies) ou créées par des blessures de tissus : attaques parasitaires (oscinies), ou des phytotoxicités d’herbicides, des avortements de grains ou d’épis ou de stress hydrique. Le champignon se développe sur les organes jeunes en croissance (apex, bourgeons axillaires, inflorescences..). Cette maladie est rarement dommageable. Il n’existe pas de solutions curatives. La maîtrise des facteurs de risque cités précédemment est la méthode la plus efficace sans toutefois apporter de garanties. Une certaine sensibilité variétale existe qu’elle soit directe ou indirecte (sensibilité aux parasites, aux accidents).
Le charbon des inflorescences est une maladie plus rare qui peut causer des pertes de rendement Importantes. Les symptômes typiques de ce charbon, dû à Sphacelotheca reiliena, ne s’observent qu’après la floraison et sont localisés sur les organes reproducteurs, panicules et épis. Le sol est la principale source d’inoculum. Le développement de la maladie dans la plante est favorisé par tous les facteurs qui affaiblissent et ralentissent la croissance juvénile des plantes, tels que des sécheresses précoces et les tassements du sol. C’est une des raisons pour lesquelles il est souvent présent dans les bordures de parcelles. Certaines variétés y sont plus sensibles.
Les autres maladies du feuillage : rouille, kabatiellose, anthracnose
Les nuisibilités graves de ces maladies sont rares, l’impact économique limité. L’enfouissement des résidus de culture, le labour, la rotation des cultures limitent leur potentiel infectieux. A contrario, la monoculture et le semis direct sont susceptibles d’augmenter les risques de développement.
Rouille et Kabatiellose apparaissent plutôt dans les régions à climat océanique frais et après la floraison. L’anthracnose apparait plus tôt (avant la floraison) et sous les climats chauds et orageux avec des pluies fréquentes.
Des différences d’expression des symptômes existent entre variétés, mais les faibles fréquences de la maladie et leur nuisibilité modérée sur les hybrides n’ont pas justifié jusqu’à aujourd’hui de sélection spécifique.
Conseils de lutte préventive
Les interactions entre le climat, l’itinéraire technique et les sensibilités des variétés obligent à mobiliser simultanément plusieurs leviers techniques pour éviter les effets cumulatifs :
- la gestion des résidus et le travail du sol dès la récolte du maïs précédent : les résidus de surface constituent un potentiel infectieux pour le maïs suivant, tant pour les fusarioses que pour les foreurs. Le broyage efficace des cannes immédiatement après la récolte et une incorporation précoce superficielle par déchaumage sous forme de mulch facilitent la décomposition de la matière organique, support des pathogènes. Les broyages et dessouchages ont aussi le grand mérite prophylactique de réduire les conditions d’hibernation des pyrales et sésamies. Ces recommandations sont néanmoins liées à des conditions de récolte et du climat, elles sont d’autant plus faciles à mettre en œuvre que les dates de récolte ne sont pas trop tardives ;
- des dates de semis du maïs précoces associées à des précocités de variétés appropriées permettent d’esquiver, par des maturations plus précoces, l’exposition aux fusarioses des épis qui sont favorisées par les automnes doux et humides. Les semis précoces permettent, en avançant le cycle, d’atteindre des niveaux de teneurs en eau du grain plus faibles lorsque les conditions d’hygrométrie de l’automne redeviennent propices à la progression des champignons ;
- le choix de variétés : retenir une variété de précocité adaptée à la région et à un objectif de date de récolte précoce reste la précaution la plus importante. Dans le cas de semis sans labour ou sans travail du sol permettant une bonne dégradation des résidus, il est conseillé d’éviter les variétés les plus sensibles. Les informations fournies par l’obtenteur ou à défaut l’observation au champ des parcelles par l’agriculteur dans le mois qui précède la récolte permettent d’écarter le matériel le plus sensible ;
- la protection des parcelles vis-à-vis des pyrales et sésamies (voies d’entrée des champignons) s’impose lorsque les risques d’infestation le justifient. La stratégie est de limiter les populations, et notamment les chenilles de 2ème génération;
- des dates de récolte qui tiennent compte de l’état sanitaire des grains. Lorsque des symptômes sont installés, la récolte ne doit pas être trop différée après la maturité pour limiter la progression des fusarioses et l’accumulation de toxines. Ce pilotage passe par une évaluation des risques quelques semaines avant la date de récolte présumée, en tenant compte du risque lié aux pratiques culturales, des conditions climatiques de l’année, du diagnostic des attaques de Fusarium et enfin des prévisions climatiques des semaines suivantes.
Maïs et mycotoxynes : un risque maîtrisé
La mise en place de la règlementation européenne (N° 1887/2006) pour les céréales concernant le risque mycotoxines oblige à une vigilance accrue sur les causes qui déclenchent leur apparition.
Pour qu’il y ait toxines, il faut qu’il y ait des champignons pathogènes susceptibles de les produire. Cette condition est nécessaire mais pas suffisante. La présence de fusarioses sur épis n’induit pas forcément la production de toxines. Des enquêtes importantes ont été menées en Europe pour classer et hiérarchiser les causes d’apparition du risque. Il apparait très vite que le climat a un poids prépondérant sur l’infection et le développement des fusarioses des épis et leur production de toxines : pluviosité au moment de la floraison femelle et dans les jours qui suivent, hygrométrie et niveaux de température après la floraison et surtout au début de l’automne. Les stress hydriques et thermiques, la présence de foreurs accentuant l’exposition aux pathogènes.
Pour le DON et la zéaralénone, sécrétés par le Fusarium graminearum, les facteurs de risque sont d’abord la date de récolte et le stade de maturité, la sensibilité variétale et la gestion des résidus des précédents culturaux.
Les fumonisines sont secrétées par des Fusarium (principalement F.verticillioides et F.proliferatum) qui sont des champignons plutôt saprophytes. Ce sont donc les blessures provoquées par les insectes foreurs sur les épis et les tiges (pyrales, sésamies, héliothis) ou les fissures sur les grains provoquées par le stress hydrique, ou encore les surcontaminations sur des pathogènes déjà présents sur les épis (dont le F. graminearum) qui favorisent le développement des fumonisines. Comme pour F. graminearum, il existe une certaine sensibilité variétale à ces champignons.
Le risque d’apparition d’aflatoxines (B1 ou B2), redouté par les fabricants d’aliments du bétail, est provoqué par certains champignons proliférant notamment sur des graines conservées en atmosphère chaude et humide (comme Aspergillus flavus). Le risque, plus faible en climat tempéré est plus élevé pour les maïs du sud et l’est de l’Europe.